Le Figaro d’Edmond de Goncourt. Défense et illustration d’un théâtre fin de siècle
Résumé
Bouffonnerie satirique en un acte représentée pour la première fois au Théâtre Libre d’Antoine le 16 janvier 1893, À bas le progrès! constitue la dernière œuvre originale d’Edmond de Goncourt, mais aussi une synthèse de ses aspirations dramaturgiques. L’article analyse la pièce à la lueur du programme esthétique que Goncourt précise durant les dernières années de sa vie et apprécie sa valeur par rapport à la production précédente de l’auteur dans le contexte théâtral des deux dernières décennies du XIXe siècle. Dans cette farce qui dresse un bilan impitoyable de la société fin de siècle, Edmond de Goncourt condense les éléments fondamentaux de son idéologie antilibérale et réactionnaire, mais propose surtout un renouvellement du théâtre à travers un retour à la tradition comique du XVIIIe siècle incarnée par Beaumarchais et la recherche d’une langue littéraire parlée, l’un des piliers de l’esthétique goncourtienne. La défense de ce théâtre national contre les dramaturges russes et scandinaves s’accompagne de la représentation de l’esprit français de l’époque que l’auteur identifie avec la “blague”. Elle est aussi l’occasion pour Edmond de Goncourt d’éprouver une dernière fois ses capacités de précurseur que l’histoire littéraire continuait à lui dénier.
Satirical one-act buffoonery first performed at Antoine’s Théâtre Libre on January 16, 1893, À bas le progrès! is Edmond de Goncourt’s last original work, but also a synthesis of his dramaturgical aspirations. The article analyses the theatre piece in the light of the aesthetic program that Goncourt specified during the last years of his life and appreciates its value in relation to the author’s previous production in the theatrical context of the last two decades of the 19th century. In this farce, which gives a merciless assessment of society at the end of the century, Edmond de Goncourt condenses the fundamental elements of his anti-liberal and reactionary ideology but above all proposes a renewal of the theatre through a return to the comic tradition of the 18th century embodied by Beaumarchais and the search for a langue littéraire parlée, one of the pillars of the Goncourt aesthetic. The defence of this national theatre against Russian and Scandinavian playwrights is accompanied by a representation of the French spirit of the time, which the author identifies with the “joke”. It is also an opportunity for Edmond de Goncourt to experience one last time his capacities as a precursor that literary history continued to deny him.